L’utilisation de Snapchat par les candidats à la présidentielle de 2017

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Par Frédéric Junger Modifié le 19 décembre 2017 à 18h18
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« Pour faire surface sur le marché électoral, c'est-à-dire être considéré comme un candidat crédible, il est nécessaire d’être médiatiquement visible » (Gerstlé, 2016), et donc user des multiples supports venus enrichir la panoplie des outils de communication disponibles pour une campagne électorale.

Changer les relations entre politiques et citoyens

De ce fait, il y a presque une injonction, pour un candidat politique, à être présent sur toutes les plateformes en ligne, l’objectif étant de donner l’impression d’une disponibilité et changer la relation entre politiques et citoyens, motivés par un constat : les citoyens ne votent plus. Il parait donc opportun pour les politiques de mobiliser les médias sociaux dans le but de rompre avec l’idée qu’ils sont déconnectés de la réalité. Si dans les territoires géographiques de nombreux éléments contribuent à une différenciation, dans les territoires du numérique tout est supposé nous rapprocher et nous rendre plus égaux.

Des séances de questions-réponses menées par des utilisateurs français de Snapchat ont été diffusées tout le long de la semaine du 17 au 20 avril 2017. Cela faisait suite à plusieurs tentatives infructueuses tentées ces dernières années pour investir le réseau à la mode chez les 18-24 ans. Nicolas Sarkozy, puis François Hollande s’étaient essayés à la publication sur ce dispositif socionumérique, sans réel succès. Ces tentatives ont néanmoins pu mettre l’accent sur les particularités du média, notamment en termes de format à utiliser, qui diffèrent des autres plateformes comme Facebook ou Twitter.

Au travers de ce type d’interventions, on assiste à un paradoxe, d’une part il s’agit d’attirer les jeunes vers la prise de position, en émettant l’hypothèse qu’ils seront enclins à participer davantage si leurs supports favoris sont utilisés. D’autre part, on use de la plaisanterie, notamment par l’usage de filtres propres au support (les interventions sont visibles sur YouTube), au risque de rendre peu ou moins crédible le discours politique qui accompagne.

Une expression nécessairement amputée de fond

La campagne électorale traditionnelle ou classique s’appuyait sur des temporalités et des espaces précis d’échanges, organisés, préparés et structurés. Le politique partait à la rencontre de ses électeurs potentiels en allant visiter leur territoire. Ces pratiques ne sont pas abandonnées, toutefois, au travers des communications numériques, les communautés rencontrées sont « plurielles et a-territorialisées, car potentiellement planétaires » pour reprendre les termes de Pierre Musso. Ce qui implique des ajustements dans les interventions, avec parfois des prises de risques et la tentation de nouvelles expériences.

Il faut s’adresser au plus grand nombre tout en mettant en avant ses positions et son identité. C’est ainsi que même involontairement, en fonction de la nature même du dispositif et des contraintes périphériques, l’expression des politiques est nécessairement « amputée » du fond, de la réflexion, qui est pourtant le socle du débat dans l’espace public.

Sur le chemin de la désacralisation des institutions et la reconfiguration des représentations, ce type d’intervention vient accentuer un rapprochement symbolique en utilisant des artifices. Dans l’optique d’une recherche de désintermédiation entre politique et électeur, en promettant l’interaction sans filtres, que peuvent représenter les médias et plus particulièrement les journalistes. Il existe pourtant une géographie des rôles en politique et dans le jeu du débat démocratique. Cependant le désintérêt croissant des citoyens et des électeurs pour les différents suffrages mènent les candidats à expérimenter de « nouvelles » approches de l’électorat.

Extrait de l’atelier « L'utilisation de Snapchat par les candidats à la présidentielle de 2017 » aux 7èmes Rencontres « Entreprise & Sacré » Propedia du 7 décembre 2017.

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Frédéric Junger est doctorant en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Bourgogne, où il prépare une thèse sur les médias sociaux et la communication politique.

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