Notre classe politique, en particulier à l'extrême gauche, a un rapport très spécial avec la vérité. Aujourd'hui, je vous propose de déplacer légèrement notre loupe pour nous intéresser au rapport qu'entretiennent les politiques avec leurs propres convictions.
Comme le dit si bien le président, la mémoire est un devoir.
Aussi, au vu de certaines déclarations et décisions, l'exécutif semble avoir oublié les positions qui étaient les siennes il n'y a encore pas si longtemps que cela. De toutes mes forces, je voudrais donc l'aider à se souvenir.
Commençons avec notre Premier ministre. Lorsqu'il est entré en fonction, Edouard Philippe cultivait volontiers une image de libéral. L'été passé, il racontait au micro de France Culture comment la lecture de Raymond Aron et de Friedrich Hayek lui avait permis de "sortir de [sa] zone de confort". Le diplômé de Sciences Po expliquait même :
« La première fois que je me suis baladé avec un livre de Hayek, mes copains de gauche étaient horrifiés. Ils pensaient que j'allais devenir un type abominable. Ils ont d'ailleurs peut-être finalement trouvé dans ma nomination à Matignon la confirmation de leurs angoisses. »
A en croire l'ancien maire du Havre, il serait « venu à la droite pour la liberté d'abord ». Voici ce qu'il déclarait il y a à peine un an de cela :
« Moi je place la liberté au-dessus de tout : liberté intellectuelle, d'expression, de manifester. Et cette prééminence que j'accorde à la liberté, je constate qu'elle me place plus souvent à droite qu'à gauche. [...] Mais quand j'ai acquis cette certitude que le principe le plus essentiel pour la vie en société c'était de préserver les libertés publiques et la liberté individuelle, j'ai constaté que mes potes de gauche me classaient assez sûrement à droite. Et si c'est ça être de droite je l'assume complètement. »
Bien. Ceci posé, pensez-vous que ce genre de sorties estivales soit à même de faire transpirer d'angoisse un gauchiste ?
Edouard Philippe ne dispose-t-il pas pour autant de centaines d'exemples historiques permettant de savoir comment ce genre de plaisanterie va inéluctablement se terminer ?
Emmanuel Macron, lui, avait notamment fait la promesse suivante lors de son interview du 15 avril par BFM TV/RMC/Mediapart :
Au cas où nous douterions, le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin avait d'ailleurs confirmé cet engagement quelques jours plus tard au micro de RTL :
Voici pourtant quelques pépites tombées pendant l'été et à la rentrée qui ne manqueront pas de réjouir les ménages et les entreprises :
Comme vous pouvez le constater, l'ultralibéralisme continue de ravager notre beau pays...
Comme le disait Jean Poiret dans le film Le Canard à l'orange : « quel dommage qu'on ne puisse pas se faire opérer de la conscience comme on se fait opérer de l'appendicite ! »
Mais à changer d'avis, au moins devient-on celui que l'on devait être, et cela est sans doute toujours mieux que de ne jamais remettre en cause ses opinions.
Enfermés dans une prison intellectuelle en formica
À tout seigneur tout honneur. Commençons donc avec l'ancien président. À l'instar de l'immense majorité de ses camarades de jeu, François Hollande a une solution toute trouvée dès lors qu'un problème pointe le bout de son nez.
Tant que Pierre n'aura pas les mêmes niveaux de revenus et de patrimoine que Paul, l'ancien président sera visiblement toujours en faveur d'une augmentation des prélèvements obligatoires. Il est vrai qu'à 45,3%, on a encore un peu de marge devant nous avant que l'économie française ne devienne majoritairement communiste.
Si l'on croise ce genre de déclaration et ses évidentes velléités de faire un retour en politique, on en vient à se demander pourquoi François Hollande n'essaye pas de négocier un ticket chez Les Républicains en vue de reprendre les rênes du pays.
L'électeur un peu plus las préférerait cependant que l'ancien président retourne directement dans sa cuisine en formica pour ne plus jamais en ressortir.
La France retrouvera sa grandeur... en refusant la technologie
Ressortir ad libitum les recettes du passé pour rester enfermé dans le XXe siècle, est-ce une maladie que l'on ne contracte qu'une fois installé à l'Elysée ou sur un fauteuil de parlementaire ? C'est la question que je me suis posée lorsque j'ai appris les nouvelles suivantes.
Commençons avec cette grande avancée dans le royaume de France. A la rentrée prochaine, les écoliers et les collégiens n'auront plus le droit d'utiliser un téléphone portable au sein de leur établissement, sauf autorisation expresse d'un professeur.
Bientôt le retour du combo tablier + plume et encrier ?
Ne comptez pas sur le Sénat pour relever le niveau. Au mois de juin, les handicapés de la technologie du Palais Luxembourg ont adopté, dans le cadre d'une proposition de loi sur le « Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs », une taxe sur les livraisons de marchandises achetées sur internet.
Son montant aurait vocation à varier entre 1% et 2% du prix, en fonction de la distance parcourue entre le dernier entrepôt et votre boîte aux lettres. Du suicide économique, comme le relève le président d'Objectif France, Rafik Smati.
Cette mesure est une parfaite illustration de l'action du gouvernement telle que caricaturée par Ronald Reagan dans la célèbre formule :
« Si ça bouge, taxez-le. Si ça continue à bouger, régulez-le. Si ça s'arrête de bouger, subventionnez-le. »
Et, comme on n'est plus à ça près, sachez également que la jeunesse va bientôt écoper d'un « service national universel » (dont le principe a été gravé dans la Constitution au mois de juillet) qui devrait prendre la forme d'un mois de service national obligatoire pour tous les jeunes âgés de 16 ans, suivi d'un volet volontaire de trois mois « dans nos armées, nos forces de police, chez nos pompiers, nos gendarmes, dans des collectivités ou encore dans les associations », comme l'indique la ministre des Armées Florence Parly.
Pour ce qui est du volet obligatoire, dont la ministre nous explique qu'il s'agit d'une « période où les jeunes vivront ensemble, apprendront à se connaître, se comprendre, s'apprécier, quelles que soient leurs origines, leurs croyances ou leurs orientations », je partage l'avis de l'économiste Nicolas Bouzou.
D'autres partent d'intentions louables mais pataugent dans l'incurie la plus profonde...
Qu'il est triste de voir l'Etat reproduire sans cesse les mêmes erreurs, préférant systématiquement l'interventionnisme balourd à la liberté...
Mais assez de choses désespérantes pour aujourd'hui ! A ceux qui ne sont pas morts de tristesse en lisant ce billet, je vous propose de me retrouver la semaine prochaine pour voir comment nos politiques ont parfois de drôles de façons de s'indigner.
Pour plus d’informations de ce genre, c’est ici et c’est gratuit