Ce mardi 13 mai 2025, une vaste opération policière a visé une organisation qualifiée d’extrême droite complotiste en Allemagne : le Royaume d’Allemagne (Königreich Deutschland).
Royaume d’Allemagne : c’est quoi ce réseau complotiste qui a été dissous outre-Rhin ?

Ce réseau, affilié à la mouvance des Reichsbürger (« citoyens du Reich »), prône la fin de la République fédérale allemande pour restaurer une forme d’empire pseudo-constitutionnel.
Le Royaume d’Allemagne : un État dans l’État ?
Le Royaume d’Allemagne - Königreich Deutschland - se présente comme un contre-modèle radical du système démocratique allemand. Fondé en 2012 à Lutherstadt Wittenberg par Peter Fitzek, autoproclamé « souverain suprême », ce groupe a progressivement bâti un État fictif doté de sa propre constitution, de documents d’identité, d’une monnaie baptisée E-Mark, d’un système bancaire parallèle, et même de prétendues « assurances sociales »... Tout y est — sauf la légalité.
Selon le Bundesamt für Verfassungsschutz (Office fédéral de protection de la Constitution), le groupe « tente de se positionner comme un État de substitution avec une prétendue légitimité fondée sur le droit international ». Le Royaume d’Allemagne – Königreich Deutschland ou KRD revendique plus de 6 000 membres, dont 800 « citoyens » officiels, chiffre confirmé par le rapport institutionnel daté de novembre 2023.
Le réseau a mené une stratégie d’implantation territoriale en achetant plusieurs propriétés pour fonder des « villages du bien commun », notamment à Lutherstadt Wittenberg, Eibenstock-Wolfsgrün, Bärwalde, ou Halsbrücke, où son fondateur, Peter Fitzek a été arrêté mardi.
Démantèlement et dissolution : une opération sous tension
La police allemande — une semaine après l'élection du nouveau chancelier allemand Friedrich Merz — a procédé à des perquisitions dans sept Länder (régions), visant 14 domiciles liés au groupe. À Halsbrücke (Saxe), l’arrestation de Peter Fitzek a été filmée et confirmée par plusieurs sources officielles. Cette opération s’est accompagnée d’une décision ministérielle de dissolution, justifiée par une « atteinte grave à l’ordre démocratique libéral », rendue publique dans un communiqué du ministère de l’Intérieur.
La Bluewin précise : « Selon les autorités, l'organisation défend l'idée que l'Empire allemand (1871-1945) n'a jamais cessé d'exister, rejetant ainsi la légitimité de la République fédérale ». La Libre ajoute : « Ses partisans ne se considèrent pas soumis aux lois de l’Allemagne moderne, mais comme citoyens d’un empire antérieur ».
Reichsbürger, nazis et complot : la résurgence d’un nationalisme masqué
Le Royaume d’Allemagne – KRD – n’est pas un groupe isolé. Il s'agit de « la plus grande organisation » de la mouvance des Reichsbürger – « citoyens du Reich » – qui comptait environ 23 000 membres en 2022 selon le Bundesamt für Verfassungsschutz (l’Office fédéral de protection de la Constitution) (La Libre). Ces militants rejettent la légitimité de la République fédérale d’Allemagne, s’appuient sur des interprétations historiques fantaisistes, et recourent à des discours conspirationnistes ou antisémites — comme la dénonciation récurrente du « système de l’argent-dette » par Peter Fitzek, documentée dans les dossiers du (Bfv) relayée par La Libre.
La stratégie est claire : capter un public par des promesses de souveraineté, d’impôts abolis et de reconstruction sociale. L’Office fédéral alerte : « L’idéologie du KRD pousse ses membres à enfreindre les lois de la République et favorise une radicalisation silencieuse ». La Banque fédérale de supervision (BaFin) avait déjà ordonné la fermeture forcée de ses « caisses du bien commun » en février 2023. Mais en vain, le royaume d'Allemagne poursuivait ses activités, usant de personnes relais pour acheter de nouveaux terrains en Allemagne… et parfois même en Suisse. Le Verfassungsschutz insiste : « Ce modèle de pseudo-rédemption individuelle est un piège juridique et financier pour les personnes qui y adhèrent, souvent vulnérables ou idéologiquement conditionnées ».