La guerre d’Algérie a laissé une empreinte indélébile sur l’histoire de la France et de l’Algérie. Pourtant, un acteur central de sa résolution reste méconnu : la Suisse. Discrète mais influente, elle a su, au fil des négociations d’Évian, dépasser son rôle traditionnel de neutralité pour devenir l’un des principaux médiateurs des accords d’Évian. Éclairage par Moncef Djaziri, Bons Offices Intermédiation de la Suisse et négociations d’Evian 1959-1962. Contribution helvétique à la paix et à l’indépendance de l’Algérie, Falcon Éditions.
Indépendance de l’Algérie : le rôle méconnu de la Suisse dans les accords d’Évian

Pour les uns, la Suisse a joué un rôle d’intermédiation tandis que pour les autres, son rôle strict a été celui des bons offices conforme à sa neutralité. Ces appréciations divergentes nous ont amené à vouloir aller plus loin que les déclarations des uns et des autres. Ce qui est au cœur du livre, ce n’est ni la guerre d’Algérie, ni à proprement parlé les détails des négociations franco-algériennes, sujets sur lesquels il existe une abondante littérature et travaux cités dans le livre. Son objet est l’analyse détaillée du rôle effectif de la Suisse lors des négociations franco-algériennes d’Évian.
Le général de Gaulle voulait sortir de « guêpier algérien » qui commençait à peser lourdement sur la vie politique française. La question algérienne était devenue progressivement une question de politique intérieure. De Gaulle voulait donc mettre fin à une guerre qui de toutes les façons et pour différentes raisons, y compris diplomatiques, devait trouver une issue politique. Le président français cherchait à sortir la France du piège algérien sans que cela apparaisse comme un abandon ou une trahison. Il cherchait à tourner la page de la colonisation sans que cela soit perçu comme une défaite. Il s’agissait de trouver une issue honorable au conflit : la Suisse l’y a aidé. C’est l’objet du livre.
En dépit de sa politique de neutralité, la Suisse a joué un rôle actif dans les préparatifs puis le déroulement des négociations ayant conduit à l’indépendance et à la paix en Algérie. Ce rôle d’intermédiation se situant entre les bons offices et la stricte médiation-conciliation méritait qu’une étude lui soit consacrée afin de montrer qu’un petit pays comme la Suisse, placé dans une configuration internationale donnée et dotée de compétences, peut tirer avantage d’un évènement ou d’un conflit entre deux parties pour les aider à le résoudre.
Dans les négociations d’Évian, la Suisse a joué un rôle bien plus important que celui que ses dirigeants ont bien voulu le reconnaître et le faire connaître. Elle l’a fait pour des motifs humanitaires, mais également pour servir ses intérêts et promouvoir son image dans le monde. Il est important que les générations futures le sachent et en gardent la mémoire. Dans un monde en profonde transformation, il est important de garder les traces de cette époque et du rôle de la Suisse dans le conflit franco-algérien, car les hommes passent, mais l’histoire d’un pays demeure, perdure et traverse le temps et les générations.