France-Algérie : le spectre d’une rupture diplomatique ?

Avec les récentes déclarations de Bruno Retailleau, les relations entre la France et l’Algérie traversent une période de fortes tensions.

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Publié le 23 janvier 2025 à 15h58
Algérie

Depuis le début de l’année 2025, les relations entre la France et l’Algérie sont marquées par une succession de crises diplomatiques et sociales. Le 22 janvier 2025, Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a attisé ces tensions en déclarant que « aucune douleur de l’Histoire ne peut donner à quiconque, y compris l’Algérie, un droit particulier sur la France. »

Bruno Retailleau et la réaction de l’Algérie

Dans ses récentes déclarations, Bruno Retailleau a remis en question les relations historiques entre la France et l’Algérie. Le ministre de l'Intérieur a critiqué les demandes répétées de reconnaissance de la colonisation comme « un outil politique permanent ». Ces propos, relayés par plusieurs médias français, ont été perçus par Alger comme une insulte à sa souveraineté et une négation des blessures du passé.

En réponse, le gouvernement algérien a dénoncé une attitude « arrogante ». Des voix influentes à Alger, notamment dans les milieux médiatiques, ont évoqué un retour à une rhétorique coloniale, ajoutant que ces propos risquent de compromettre davantage les relations bilatérales.

Les arrestations d’influenceurs algériens : un catalyseur des tensions

Depuis janvier 2025, sept influenceurs algériens ont été arrêtés en France. Ces arrestations, parmi lesquelles celle de Rafik Meziane, connu pour ses propos controversés sur TikTok, ont fait l’objet d’une communication très médiatisée. Bruno Retailleau a notamment salué ces interpellations, affirmant qu’elles s’inscrivaient dans une lutte nécessaire contre « la haine en ligne ».

Cependant, la réaction du parquet de Paris, qualifiant cette communication de « prématurée », a suscité des interrogations. L’Algérie, de son côté, a condamné ces arrestations comme une atteinte à la liberté d’expression et un ciblage délibéré de ses ressortissants en France. Ce climat tendu a été amplifié par des manifestations de soutien à ces influenceurs.

Entre la France et l'Algérie, une plaie mémorielle

L'Algérie s'étant construite sur la haine de la France et n'ayant jamais fait de travail de réconciliation, les relations entre les deux pays restent tendues. Alger réclame régulièrement des excuses officielles pour les supposés crimes commis pendant la colonisation française, notamment lors de la guerre (1954-1962). Emmanuel Macron, souhaitant être l'artisan de la réconciliation avec ce pays, a même affirmé que la colonisation était un « crime contre l’humanité », choquant de nombreux Français.

Au cours des deux mandats d'Emmanuel Macron, la France a fait de nombreux efforts, certains étant même considérés par certains Français comme illégitimes. Ainsi, Gérald Darmanin a rendu hommage à certains membres du FLN, groupe terroriste qui a milité pour l'indépendance, notamment en tuant et en posant des bombes.

Des relations tendues de longue date

Après la décolonisation, la France et l'Algérie ont signé les accords d'Evian, qui donnaient de nombreux avantages migratoires à cette dernière. Aujourd'hui, selon le voeu des Français, certains de ces privilèges sont remis en question. En 2021, la France a réduit le nombre de visas accordés, invoquant le refus d’Alger de reprendre ses ressortissants frappés d’Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF). Cette mesure, perçue comme une sanction, a été vivement critiquée par l’Algérie, qui l’a qualifiée d’« hostile et discriminatoire ».

Les aides économiques et les subventions accordées constituent également un sujet sensible. En France, certains courants politiques estiment que ces aides ne sont plus justifiées et qu’elles doivent être réévaluées. De son côté, Alger considère ces contributions comme une dette historique et un engagement moral de la France envers son ancienne colonie.

L'immigration algérienne, un chantier difficile

Les flux migratoires entre l’Algérie et la France constituent un autre terrain de désaccord. La France accuse régulièrement l’Algérie de ne pas coopérer suffisamment dans le rapatriement de ses citoyens en situation irrégulière. En réponse, Alger met en avant des considérations humanitaires et logistiques, tout en dénonçant une stigmatisation systématique.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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