Quand Elon Musk échoue, le monde observe. A quelques semaines de la fin de son temps dans l’administration Trump, Elon Musk est encore loin des 2 000 milliards de dollars de dépenses publiques économisés.
Et si même Elon Musk ne pouvait pas réduire les dépenses publiques ?

On l’attendait comme un bulldozer budgétaire. Elon Musk s’est heurté à une muraille de dépenses inamovibles. Et ce sont tous ceux qui rêvent d’un État minimal qui regardent, médusés, l’expérience américaine s’enliser.
L’Amérique d'Elon Musk : le rêve d’une cure d’austérité mondiale ?
Le 14 avril 2025, Elon Musk, propulsé par Donald Trump à la tête d’un tout nouveau ministère américain – le DOGE, pour Department of Government Efficiency – a finalement admis son impuissance. L’objectif était clair : tailler 2 000 milliards de dollars (soit environ 1 880 milliards d’euros) dans le budget fédéral des États-Unis. Mais le couperet ne tombera pas. Pas comme prévu, en tout cas. À peine 150 milliards auraient été identifiés, un montant à peine suffisant pour faire frémir un budget colossal de 7 000 milliards de dollars.
Pour les observateurs internationaux, l’affaire fait sensation. La puissance mondiale qui inspire tant de réformes ailleurs, vient de démontrer que, même bardée de volonté politique et dotée d’un homme à poigne comme Elon Musk, l’Amérique ne parvient pas à réduire ses dépenses. Et ce constat dépasse le simple cadre américain.
Les ambitions d'Elon Musk, un signal global pour les libéraux
En janvier, Elon Musk n’avait pas mâché ses mots : les dépenses fédérales devaient être « rationalisées », « nettoyées », voire « pulvérisées ». Le message séduisait bien au-delà des frontières américaines. Pour une partie de la droite européenne – notamment en France – cette volonté affichée rappelait les promesses d’austérité ambitieuses de certains candidats à la présidentielle ou les politiques ultralibérales de Javier Milei en Argentine.
Mais la réalité s’est imposée brutalement : les dépenses américaines sont en grande partie structurelles. Sécurité sociale, santé, défense, aides aux États, infrastructures… Autant de postes budgétaires qui échappent largement à une réduction instantanée. Et même avec des plans de licenciement massifs dans l’administration fédérale, les dépenses ont continué à augmenter de 5,4 % depuis le début de l’année.
Ce n’est donc pas qu’une affaire américaine. C’est un signal d’alerte global : réduire les dépenses publiques sans casser des pans entiers de l’État est une équation presque insoluble, à tout le moins complexe. L’échec d'Elon Musk l’illustre.
150 milliards ? Même pas sûrs. Des doutes jusque dans les chiffres
Le chiffre de 150 milliards de dollars d’économies annoncé par Musk fin mars est déjà jugé peu crédible. Le New York Times, le 13 avril 2025, révèle que cette estimation inclut des contrats annulés… qui n’existaient pas, des dépenses hypothétiques qui n’auraient jamais été engagées, et des économies mal attribuées. Le cas le plus flagrant ? Une économie de 318 310 328,30 dollars revendiquée pour une annulation de contrat… qui n’avait jamais été signé.
Encore plus inquiétant : moins de 40 % des coupes budgétaires affichées par le DOGE sont aujourd’hui justifiées par des documents vérifiables. Le reste ? Des hypothèses, des prévisions, parfois même des montants inventés. Et pourtant, ces chiffres sont relayés publiquement, donnant l’impression que les équipes d'Elon Musk réalisent un travail d’assainissement inédit.
Ce que cela dit du modèle américain… et de ses limites
Pour les Français qui s’interrogent sur la possibilité de s’inspirer du modèle américain, cette séquence a de quoi troubler. Les États-Unis, longtemps présentés comme le parangon du capitalisme efficace, montrent aujourd’hui les limites de leur propre système. L’expérience d'Elon Musk à la tête du DOGE révèle que le poids de l’État américain, loin d’être un géant bureaucratique facile à renverser, est solidement enraciné.
Il faut dire que les États-Unis dépensent dans des proportions colossales. En 2025, le budget fédéral dépasse les 7 000 milliards de dollars, dont plus de la moitié est affectée à des dépenses incompressibles. Le rêve d’un État minimal n’est donc pas seulement une question de volonté : c’est une question de faisabilité politique et institutionnelle.
Un avertissement pour les réformateurs européens
La leçon américaine a de quoi faire réfléchir au-delà de l’Atlantique. En Europe, de nombreux dirigeants prônent des réformes pour alléger les structures étatiques, réduire la dépense publique et relancer la croissance. Mais le cas américain montre qu’il ne suffit pas d’avoir un discours de rupture ou une figure charismatique pour transformer un État. Il faut une stratégie, une maîtrise technique… et surtout un socle de consensus qu'Elon Musk n’a manifestement jamais construit.
Car en voulant aller vite, le DOGE a court-circuité les procédures, provoqué des conflits avec les agences concernées et semé la confusion dans les chiffres. Résultat : une réforme qui devait symboliser la renaissance de l’efficacité publique s’achève sur un aveu d’échec, regardé avec circonspection à l’international.