Grève SNCF le 7 mai : Sud-Rail lance l’offensive

Les conducteurs vont-ils devenir les fers de lance d’un bras de fer politique au sein de la SNCF ? À la veille du pont du 8 mai, les revendications syndicales prennent une tournure hautement conflictuelle.

Adelaide Motte
By Adélaïde Motte Published on 4 avril 2025 10h00
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Grève SNCF le 7 mai : Sud-Rail lance l’offensive - © PolitiqueMatin

Le 7 mai 2025, la grève annoncée par Sud-Rail prend un relief tout particulier. Officiellement motivée par la question des primes, cette mobilisation masque en réalité un désaccord bien plus profond : une opposition frontale à la direction de la SNCF et à sa politique interne, sur fond de réformes structurelles.

Sud-Rail : le fer de lance d’une opposition idéologique

Le syndicat Sud-Rail, premier représentant chez les conducteurs de trains avec 33 % de représentativité, ne se contente plus de poser des revendications salariales. L’organisation a annoncé avoir « déposé une demande de concertation immédiate pour alerter la direction », tout en accusant celle-ci de privilégier le bras de fer : « La direction fait le choix du rapport de force » (Le Figaro, 3 avril 2025).

À travers cette grève, Sud-Rail remet en question le traitement des conducteurs, notamment la baisse continue de la prime de traction. « Nos primes traction sont quasi systématiquement revues à la baisse au gré des réorganisations », ajoute le syndicat, dénonçant la flexibilité imposée comme une stratégie de réduction des coûts camouflée.


Une manœuvre tactique à forte charge politique

La date n’a pas été choisie par hasard : le 7 mai, veille du 8 mai, jour férié, permet aux cheminots grévistes d’envoyer un signal fort à la direction, tout en s'offrant un jour de plus sur un week-end qui en compte déjà quatre. Sud-Rail a déposé un préavis de grève s’étendant du 6 mai à 19h jusqu’au 8 mai à 8h, laissant « presque un mois à la direction pour ouvrir des négociations », tout en invitant « les autres fédérations syndicales à rejoindre ces dates afin de faire monter la pression ».

Ce calendrier témoigne d’une stratégie bien connue à la SNCF de ciblage des jours les plus importants pour les usagers, en l'occurrence en pleine période de ponts. Un calcul politique destiné à s’appuyer sur le mécontentement des usagers pour pousser la direction dans ses retranchements. C'est ainsi que les syndicats obtiennent de nombreux avantages, parfois coûteux pour le contribuable.

Un conflit ancré dans la transformation de la SNCF

Au-delà des primes, Sud-Rail dénonce la désagrégation du groupe SNCF, morcelé en plusieurs entités à la faveur de l’ouverture à la concurrence. Pour le syndicat, cette atomisation « dégrade les conditions de travail », tout en complexifiant la représentation syndicale. C’est précisément ce morcellement qui a poussé Sud-Rail à quitter la table des négociations sur les droits syndicaux internes.

En clair, la grève du 7 mai ne se contente pas de troubler le trafic : elle symbolise un rejet du nouveau modèle ferroviaire français, qui s'adapte ainsi à une mise en concurrence demandée par l'Union européenne depuis plusieurs années. Au reste, la SNCF, présente à l'étranger, sait profiter de la concurrence dans d'autres pays, quoi qu'elle n'en veuille pas chez elle.

Une direction mutique et une communication sous tension

Face à ces attaques, la direction de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) n’a pas encore apporté de réponse publique détaillée. Cette absence d’interaction nourrit le discours de Sud-Rail sur une direction « sourde », indifférente aux remontées de terrain. En interne, les managers de proximité seraient eux-mêmes dépassés par l’instabilité des réorganisations.

Cette grève du 7 mai dépasse le cadre d’une simple mobilisation catégorielle. Elle s’inscrit dans la fracture entre syndicats et direction devenue structurelle. À l’heure où la SNCF cherche à affirmer sa compétitivité à l’international, elle semble incapable de parler à ses agents, et surtout à ses syndicats. Pendant ce temps, les voyageurs, eux, pourraient devoir composer avec les incertitudes. Et si l’on veut éviter les mauvaises surprises, le message est clair : mieux vaut compter sur d'autres compagnes ferroviaires, les cars longue distance ou le covoiturage, plutôt que de faire confiance à la SNCF

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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