Le débat sur l’interdiction des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) en France révèle un clivage au sein même du gouvernement. Alors qu’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, assume une interdiction rapide et ferme pour plusieurs secteurs comme le textile et les cosmétiques, Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’Industrie, plaide pour une approche plus équilibrée, insistant sur l’importance de ne pas nuire aux secteurs stratégiques qui ne disposent pas d’alternatives immédiates.
Marc Ferracci : « je défends l’idée que certaines de nos industries nécessitent des PFAS »

Une interdiction totale et généralisée des PFAS en France ?
Le 17 février 2025, Pannier-Runacher a réaffirmé le soutien du gouvernement à la proposition de loi portée par Nicolas Thierry (EELV). Dans une interview au Parisien, elle a défendu la nécessité d’interdire les PFAS dans les biens de consommation non essentiels. « J’assume d’interdire les PFAS pour des usages du quotidien dès lors qu’ils ne sont pas essentiels et qu’il existe des alternatives : pour les textiles, le fart de ski et les cosmétiques, nous allons le faire. Je soutiendrai donc un vote conforme ; nous voterons la proposition de loi des écologistes ». Le texte prévoit une interdiction dès le 1ᵉʳ janvier 2026, avec des exceptions limitées qui seront définies par décret.
En parallèle, Marc Ferracci, en charge de l’industrie, adopte une posture plus prudente. Pour lui, la question centrale est d’éviter une interdiction généralisée qui pourrait provoquer des dommages collatéraux sur des secteurs industriels clés. Invité sur Sud Radio le 19 février 2025, la veille du vote, il insiste sur le fait que « certaines de nos industries nécessitent des PFAS » et qu’il faut fonder les décisions sur une analyse scientifique rigoureuse, en distinguant les composés réellement dangereux de ceux qui ne présentent aucun risque pour la santé ou l’environnement. « Je ne défends pas le principe d'une interdiction générale, je défends l'idée que certaines de nos industries nécessitent des PFAS », a-t-il déclaré.
PFAS : le gouvernement soutiendra-t-il la proposition de loi d'EELV ? "Je ne défends pas le principe d'une interdiction générale des PFAS, mais il faut trouver un équilibre" signale @FerracciMarc pic.twitter.com/GVRr7NNzZE
— Sud Radio (@SudRadio) February 19, 2025
Une réglementation hâtive face à une réalité industrielle complexe
Alors que l’Union européenne mène encore des études approfondies pour différencier les PFAS dangereux des fluoropolymères utilisés dans l’industrie, la France prend une longueur d’avance réglementaire qui inquiète les acteurs industriels. Car les PFAS, pour certains, ne sont pas remplaçables. Ce que confirme la ministre de la Transition énergétique : « les PFAS sont très difficiles à remplacer, par exemple, dans les dispositifs médicaux, les équipements des pompiers ou la transition énergétique. En fait, dès qu’on a besoin de propriété de résistance mécanique, à la chaleur, à l’eau… Je souhaite que la France se positionne dans les pays européens à l’avant-garde de ce sujet. »
Or, c’est un véritable risque industriel pour la France. L’usine Solvay à Salindres, dans le Gard, pourrait fermer car, justement, elle produit certains PFAS. « Il faut faire attention à cela. Il faut trouver un équilibre. Je serais toujours du côté de ceux qui recherchent un équilibre. L'équilibre doit être fondé sur l'analyse scientifique. Quels sont les composants, en manière précise, qui sont dangereux ? », commente de son côté Marc Ferracci. Quant au risque de voir des PFAS arriver sur le sol français par le biais du commerce international, par exemple depuis la Chine et les Etats-Unis, voire même depuis d’autres pays de l’Union européenne, le ministre a une solution. « Lorsque l'on importe des choses qui ne respectent pas nos normes, qu'elles soient sanitaires, environnementales, on doit mettre des barrières. »