Élus et fonctionnaires désormais responsables de leurs actes ?

L’heure est à la responsabilisation dans les arcanes du service public français. Avec l’entrée en vigueur d’un régime unifié de responsabilité financière des gestionnaires publics, élus et fonctionnaires font face à une nouvelle ère où chaque erreur de gestion peut désormais être sanctionnée. Un changement radical qui promet de remodeler en profondeur la gouvernance des finances publiques.

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 8 novembre 2023 à 15h54
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Réforme de la Cour des Comptes : création d'une plateforme de signalement

Depuis le 1er janvier 2023, fonctionnaires et élus sont soumis à une vigilance accrue quant à leur gestion des fonds publics. La Cour des comptes, armée de nouveaux pouvoirs de sanction, s'attelle à traquer toute irrégularité financière avec une fermeté inédite grâce à la création d'une plateforme de signalement à laquelle tous les citoyens peuvent participer. Depuis janvier 2023, plus de 1 400 signalements d'irrégularités et de dysfonctionnements ont été effectués sur la plateforme. « L’institution a voulu se réformer elle-même, afin d’éviter qu’on la réforme malgré elle », s'est ainsi félicitée auprès de nos confrères du Figaro une source interne de la Cour des Comptes. « La question de savoir si la Cour doit être une instance simplement consultative, un organisme de contrôle et d’évaluation ou encore si elle doit aussi juger les responsables publics fautifs a été tranchée. Elle doit être les trois », dixit cette même source. Les premiers arrêts rendus par la Cour, en vertu de ce nouveau régime, témoignent d'une application stricte des règles. Jusqu'à présent, la Cour des Comptes a rendu son verdict sur quatre affaires et une quarantaine d'autres sont en instruction.

Les infractions couvertes par ce nouveau régime sont diverses et signalent une intention claire de couvrir un large éventail de manquements. Cela inclut l'engagement de dépenses sans autorité compétente, l'octroi d'avantages non justifiés et les fautes graves causant un préjudice significatif. La prescription des actions est définie à cinq ans, prolongeable sous certaines conditions, ce qui permet une certaine flexibilité dans la poursuite des fautes. C'est grâce à la plateforme de signalement que l'affaire de la mise en vente aux enchères du mobilier du Château de Grignon, vendu pour une bouchée de pain malgré leur valeur, a pu être saisie par la Cour des Comptes.

Une réforme pour responsabiliser les élus et restaurer la confiance des Français

Le nouveau cadre juridique se caractérise par un régime unifié où la responsabilité des ordonnateurs et des comptables est jugée selon les mêmes critères. Ce régime, qui s'applique aux fonctionnaires et aux élus, vise à juger les acteurs de la chaîne financière sans distinction, renforçant ainsi le principe d'égalité devant la loi. L'impact de cette réforme sur l'administration publique française ne se limite pas à une simple modification des textes. En s'appuyant sur la plateforme de signalement, cette réforme se veut une refonte des mentalités et des pratiques au sein des institutions publiques, instaurant un climat de responsabilité et de transparence, sans pour autant favoriser les vendettas ou la délation : « Il y a des garde-fous, nous étudions rigoureusement chaque signalement transmis après analyse, pour information et suivi, ou enquêtes aux chambres de la Cour et aux chambres régionales concernées. Nous assurons aussi la préservation de l’anonymat lorsqu’il est demandé et la protection du statut de lanceur d’alerte le cas échéant ».

La réforme pourrait également avoir des répercussions positives sur la perception du public vis-à-vis de l'administration. En renforçant la responsabilité individuelle, elle ambitionne de restaurer la confiance dans les institutions et d'assurer que l'argent des contribuables est géré avec intégrité et efficacité. C'est une étape importante vers une gouvernance plus saine. Comme le conclut le procureur général de la Cour des Comptes : « L’idée, c’est de faire comprendre que la Cour ne devient pas plus sévère, elle demeure rigoureuse et, comme toujours, impartiale et juste ».

Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin depuis septembre 2023.

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