Dans une démarche visant à revitaliser les interactions au sein de l’Assemblée nationale, Gabriel Attal, le Premier ministre, a, selon nos confrères de Franceinfo, ouvert la porte à une transformation significative des Questions au Gouvernement (QAG). Cette initiative, soutenue par Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée, permettrait aux députés de s’adresser directement au Premier ministre.
Réforme des QAG : une manière pour Attal de prendre son envol ?
Gabriel Attal ouvert à une réforme des QAG
Les députés boudent les questions au gouvernement (QAG) depuis maintenant plusieurs mois, et ce malgré une tentative de la présidente de l'Assemblée nationale, en décembre 2023, de les étaler sur deux séances au lieu d'une de deux heures. Le Premier ministre serait par conséquent favorable à changer de nouveau le format des QAG. Cette réforme permettrait à l'ensemble des députés de poser une question au Premier ministre, chose qui n'est actuellement permise que pour les présidents de groupes. En effet, actuellement, les députés ne peuvent que questionner les ministres.
Une proposition qui fait écho à la petite polémique qui avait été lancée après que Gabriel Attal ait été surpris en train de partager une photo de son chien alors qu'il était interpellé par le président du groupe PS, Boris Vallaud, au sujet d'une motion de censure. « Je ne suis pas du genre à me planquer derrière mes ministres », a tenu à préciser le Premier ministre. Cette proposition de réforme est soutenue par la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qui avait, lors d'un courrier envoyé à l'ensemble de la Chambre basse, tenu à rappeler la présence « essentielle » du Premier ministre aux séances de QAG, ainsi que l'importance de la participation des députés. Si changement il doit y avoir, celui-ci devra être validé par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale dont les membres sont Naïma Moutchou (Horizons), Caroline Fiat (LFI), Sébastien Chenu (RN), Hélène Laporte (RN).
Le retour du duel Premier ministre - Président ?
Depuis qu'Élisabeth Borne a remis sa démission en janvier 2024, la fonction du Premier ministre semble, peu à peu, disparaître sous la figure de son successeur, Gabriel Attal. Depuis la Constitution de 1958, et avec l'introduction du suffrage universel en 1962, le pouvoir du président de la République n'a cessé de croître, et rares sont les Premiers ministres qui ne se sont pas mis en compétition avec leur Président, et inversement, surtout en période de cohabitation (situation presque impossible aujourd'hui avec l'avènement du quinquennat). Jacques Chaban-Delmas, Premier ministre sous Georges Pompidou, disait du reste à propos de cette dualité : « Il y a un problème quand on est Premier ministre ; c’est le Président ! ». L'exemple peut-être le plus connu qui mettait en exergue cette rivalité entre les deux postes est probablement le débat entre le président François Mitterrand et son Premier ministre, Jacques Chirac, à l'occasion de l'élection présidentielle de 1988. Mais on peut également citer le duel entre Chirac et Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand et Michel Rocard, etc.
Néanmoins, les tâches étaient restées plutôt équitablement réparties entre le Président et son Premier ministre, le premier ayant plutôt la charge des affaires extérieures, l'autre intérieures. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la fonction de Premier ministre s'est retrouvée étouffée par l'omniprésence du Président. Il est celui qui a amené à une hyper-présidentialisation de la Vᵉ République, relayant le rôle du Premier ministre à celui d'un simple exécutant. Le dernier exemple en date n'est autre que la prédécesseure de Gabriel Attal, Élisabeth Borne, qui n'avait par ailleurs aucune vue sur la fonction présidentielle, contrairement à ce que semble entrevoir le jeune Premier ministre. On peut supposer que Gabriel Attal voit dans sa promotion une occasion de faire campagne pour 2027, et qu'il souhaite ainsi se montrer présent, voire s'imposer, nonobstant ses ministres, sur un maximum de sujets. Son principal concurrent pourrait en effet être Jordan Bardella, dans le cas où Marine Le Pen se verrait retirer son éligibilité. Emmanuel Macron n'ayant pas d'héritier, on pourrait imaginer dans la nomination de Gabriel Attal, une manière pour le Président de le préparer à prendre sa suite. Toutefois, et au vu de la manière de gouverner du Président, qui est marquée par un présidentialisme fort, rien n'est sûr quant à l'indifférence que pourrait laisser cette initiative.