Jean-Noël Barrot juge « légitime » de revoir l’accord UE-Israël

Le cadre juridique des relations entre l’Union européenne et Israël fait l’objet d’une attention renouvelée. La France soutient une initiative de réexamen portée par les Pays-Bas, sur fond de préoccupations humanitaires croissantes à Gaza.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 12 mai 2025 16h37
barrot-juge-legitime-revoir-accord-ue-israel
barrot-juge-legitime-revoir-accord-ue-israel - © PolitiqueMatin

Le samedi 11 mai 2025, Jean-Noël Barrot, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, a exprimé son soutien à la démarche diplomatique initiée par les Pays-Bas visant à obtenir un réexamen de l’accord d’association entre l’Union européenne (UE) et Israël.

Une clause politique au centre du dispositif européen

L’accord d’association entre l’UE et Israël, en vigueur depuis 2000, repose sur un socle politique explicite : son article 2 stipule que la coopération entre les deux parties est fondée sur le respect des droits humains et des principes démocratiques. Ce cadre juridique est comparable à celui appliqué aux autres partenaires euro-méditerranéens. Il implique, en théorie, que des manquements graves aux principes inscrits dans le traité peuvent entraîner une remise en cause de ses bénéfices.

C’est précisément ce levier que le gouvernement néerlandais a souhaité activer. Le ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas, Caspar Veldkamp, a adressé une requête formelle à la Commission européenne pour qu’elle évalue si Israël respecte toujours les engagements liés à cette clause. Cette demande, transmise dans un format diplomatique classique, appelle à une instruction rapide du dossier par les services compétents à Bruxelles.

La position française : entre alignement européen et prudence stratégique

En apportant son appui à cette initiative, la France ne remet pas en cause l’existence même de l’accord d’association, mais considère que son contenu doit être examiné à l’aune de la situation actuelle. Jean-Noël Barrot a précisé que cette demande était « légitime » et a invité la Commission européenne à en assurer le suivi. Il a toutefois rappelé que Paris attend les conclusions de cette instruction avant d’adopter une position définitive sur les conséquences éventuelles à tirer.

Ce positionnement s’inscrit dans une logique de coordination entre États membres, à un moment où plusieurs voix au sein de l’UE s’interrogent sur la pertinence du maintien d’une relation non conditionnée avec Israël. Pour la diplomatie française, il s’agit d’initier un débat institutionnel sur l’application effective des accords européens, tout en conservant une posture de dialogue avec l’ensemble des parties.

Contexte humanitaire à Gaza : un facteur déclencheur

Le soutien français à la requête néerlandaise intervient dans un climat de tension croissante autour de la situation à Gaza. Depuis la reprise de l’offensive israélienne début mars, les flux d’aide humanitaire sont presque totalement interrompus. Selon les données transmises par les agences de l’ONU, 2,4 millions de personnes sont actuellement exposées à une situation de pénurie généralisée, dans un territoire sous blocus.

Cette situation est régulièrement décrite par les observateurs comme une crise humanitaire majeure. Le ministre français a tenu à souligner la gravité des faits en dénonçant les conditions de vie de la population gazaouie. Il a également évoqué les interrogations exprimées, y compris au sein de la société israélienne et de la diaspora juive, quant aux conséquences des choix opérés par le gouvernement israélien.

La réponse européenne attendue : vers un examen institutionnel ?

La Commission européenne, destinataire des deux demandes formelles, néerlandaise et française, n’a pas encore publié de réponse officielle. Toutefois, selon plusieurs diplomates européens, la requête sera étudiée dans le cadre des mécanismes existants, notamment à travers les services du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et les instances de suivi de l’accord d’association.

La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a proposé, au nom de l’UE, une assistance à Israël pour faciliter l’acheminement de l’aide à Gaza. Cette proposition, qui vise à débloquer l’accès humanitaire sans remettre directement en cause l’accord d’association, n’a pour l’instant reçu aucune suite concrète de la part des autorités israéliennes.

Enjeux politiques à moyen terme pour l’UE et ses États membres

La situation actuelle pose à l’Union européenne une question de cohérence entre ses valeurs affichées et ses partenariats contractuels. Le cas israélien, en tant que partenaire économique et scientifique de premier plan, constitue un test de la capacité de l’UE à faire usage des clauses politiques contenues dans ses accords bilatéraux.

Pour la France, ce dossier s’inscrit aussi dans un cadre plus large de crédibilité internationale. En soutenant une instruction sur le respect de l’article 2, Paris affirme son attachement au respect du droit humanitaire tout en ménageant une marge de manœuvre diplomatique.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

Suivez-nous sur Google News PolitiqueMatin - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

No comment on «Jean-Noël Barrot juge « légitime » de revoir l’accord UE-Israël»

Leave a comment

Comments are subject to moderation. Only relevant and detailed comments will be validated. - * Required fields