Présidentielle 2017 : la COP 21, une arme à double tranchant

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Par Jean-Pierre Riou Modifié le 3 juillet 2015 à 14h23
France Environnement Cop21 Francois Hollande Presidentielle

L’électorat socialiste cache de moins en moins sa déception d’une politique restée trop à droite et dont les fruits se font attendre. D’autant que d’autres choix, moins européens, n’ont pas à rougir de la comparaison concernant la réaction au crack de 2008.

Ni en termes de croissance :

Ni en termes d’emplois :

De grandes causes nationales restent cependant susceptibles d’octroyer au pouvoir exécutif le prestigieux rôle de chef de guerre, grand pourvoyeur de cotes de popularité. Le 2° mandat de G.W.Bush n’y fut pas étranger, les récents événements terroristes sur notre sol l’ont confirmé.

La Conférence des Parties sur le climat (COP 21 de Paris 2015) serait elle susceptible de conférer une aura de sauveur planétaire ?

Tous les indicateurs semblent au beau fixe, dans un domaine désormais soutenu par l’église, par l’omniprésence dans les médias de la moindre anomalie climatique et dont le combat se situe sur un terrain où il semble difficile de critiquer les choix stratégiques, tant l’opacité est grande aussi bien en ce qui concerne les sommes vertigineuses concernées que les résultats obtenus sur le nombre de degrés de réchauffement global que cette mobilisation historique aura su éviter.

Après la loi sur la transition énergétique qui consacre l’avènement des énergies éoliennes et photovoltaïques, ce prestigieux rendez vous, tant attendu pour fédérer la nation, pourrait cependant représenter un véritable quitte ou double.

En effet, les principaux moyens retenus pour réduire les émissions de CO2 se sont révélés inefficaces et ruineux. En France, bien sûr, où les dizaines de milliards d’euros d’argent public engagés dans les énergies renouvelables peuvent promettre bien des choses… sauf de réduire les émissions d’un parc de production d’électricité qui n’en émet déjà pratiquement pas, plus de 90% de sa production totale, d’origine nucléaire ou hydraulique, en étant quasiment exempte. Mais également dans les pays voisins, particulièrement chez les champions de l’éolien, qui, après un quart de siècle et des centaines de milliards d’euros engloutis, restent les plus gros pollueurs et de surcroît, les plus dépendants du charbon. L’Allemagne, notamment, malgré l’implantation de 23.89 GW éoliens et photovoltaïque supplémentaires depuis 2011 a augmenté parallèlement sa puissance installée en charbon/lignite de 2.68GW, sans supprimer pour autant le moindre GW nucléaire. La pollution de l’air est pourtant considérée la 1° cause sanitaire environnementale, responsable de 400 000 décès prématurés chaque année en Europe. Et le charbon en est le principal responsable.

C’est pourquoi la volonté française de remettre en cause ses principaux atouts face à l’enjeu climatique suscite bien des interrogations outre atlantique où la presse se demande pourquoi nous abandonnons ce qui était notre plus belle réussite en matière de contrôle des émissions de CO2 et rappelle que nous sommes le plus gros exportateur d’électricité de la planète tout en fournissant un courant bon marché. L’article mentionne que l’Etat français, détenteur de 90% d’Areva, son constructeur et de 85% d’EDF, son exploitant, peut légitimement être fier de cette preuve de la grandeur de la France dont la stratégie s’est révélée payante en lui permettant de se hisser au 2° rang de l’économie européenne, derrière l’Allemagne. L’article estime que les 330 milliards de dollars nécessaires à la construction de notre parc nucléaire auront correspondu à une production d’électricité au cout moyen actualisé de 5 cents par KWh ! Ce parc de production d’électricité est pourtant la cible privilégiée de la loi de transition énergétique, supposée lutter contre le réchauffement climatique.

Il n’est pas anodin de lire, dans ce même article, que notre développement éolien et photovoltaïque, qui contribue à placer la France au 2° rang européen des producteurs d’énergies renouvelables, est jugé responsable d’une part non négligeable des problèmes économiques actuels de la filière nucléaire, dont la production de base avait vocation à fonctionner à plein régime et non à s’adapter aux caprices de productions aléatoires. La promesse électorale de sa réduction à 50% de la production totale, désormais gravée dans le marbre de la loi sur la transition énergétique, dont le vote solennel ne saurait tarder, serait ainsi de nature à compromettre définitivement sa viabilité. Ce qui pourrait d’ailleurs en avoir été indirectement le principal objectif.

Sur ce point, n’attendons pas d’approbation de la part de David Cameron. Sa récente et confortable réélection annonçait déjà la fin de l’éolien terrestre en Grande Bretagne, dans la mesure où il avait annoncé qu’en cas de réélection, il couperait toute subvention pour les éoliennes terrestres. Il aurait même demandé à ses ministres qu’ils se « débarrassent de cette merde verte » (Get rid of the green crap). C’est donc désormais chose faite.

En 2011, une étude du cabinet PWC chiffrait le poids économique de la filière nucléaire, en France, à 410 000 emplois et 2% du PIB. Toutes proportions gardées, le fabricant d’éoliennes danois Vestas vient d’annoncer qu’il profitait « à plein du rebond du marché français » et, faisant état de 37% de l’éolien en France, dénombrait 300 emplois sur notre sol. Est il exagéré d'extrapoler ainsi un total de 810 emplois français dans l'éolien ? Ce qui, comparé au surcout 2014 du tarif d'achat éolien, qui est de 860 millions d’euros (d'après la CRE), correspondrait à plus d'un million d’euros d’argent public annuel, mis en regard de chacun de ces emplois.

Les promesses de « croissance verte », sont en effet contredites par les nombreuses études qui mettent en évidence que « les emplois verts tuent les emplois ». Les affirmations de maitrise des couts sont démenties par la hausse du prix de l’électricité de 49% depuis 2007, dans laquelle la responsabilité des énergies renouvelables ne saurait utilement être masquée par l’ouverture du marché à la concurrence. Une rupture d’approvisionnement électrique, redoutée par EDF en période de grand froid anticyclonique, achèverait de condamner cette politique énergétique lors de la COP 21 de décembre prochain.

Il en avait couté cher à Arnaud Montebourg d’avoir voulu faire évoluer les choix politiques trop tôt. Un an et demi avant les présidentielles, il pourrait en coûter plus cher encore de s’arc bouter sur des promesses fondées sur des hypothèses largement démenties, depuis, par les faits.

La crise économique que traverse l’Europe est contemporaine à la restructuration de son système électrique. Les milliers de milliards d’euros engagés dans cette transition, ainsi que la perte de compétitivité des industries européennes, entrainée par l’élévation du cout de l’électricité, ne sauraient y être étrangers. Pour certains observateurs, ce paramètre aurait même supplanté celui de la dette.

Pourtant, l’impact environnemental d’une telle politique ne semble même pas avoir fait l’objet de l’examen rigoureux d’études indépendantes. Pire, France Stratégie relevait que « Chose incroyable, il n’existe aucune analyse des impacts des énergies renouvelables sur les émissions mondiales, prenant en compte l’intermittence, les cycles complets du carbone et les substitutions entre production et consommation du carbone dues aux prix élevés. »

Parvenu à un tel gâchis, il sera problématique d’admettre qu’on s’est trompé. D’ici 2017, le premier à le faire ne manquerait pourtant pas d’arguments pour légitimer sa candidature.

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Jean Pierre Riou est chroniqueur indépendant sur l'énergieMembre du bureau énergie du collectif Science Technologies ActionsRédacteur du blog lemontchampot.blogspot.com

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