France-Algérie : une guerre froide diplomatique sans fin

Les relations entre la France et l’Algérie oscillent entre crises diplomatiques, accusations mutuelles et contentieux historiques. La récente convocation de l’ambassadeur de France à Alger relance un cycle de tensions

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Publié le 29 janvier 2025 à 13h00
Algérie (1)

Le 28 janvier 2025, l’Algérie a convoqué Stéphane Romatet, ambassadeur de France, pour protester contre le traitement réservé à ses ressortissants dans les aéroports parisiens. Cet épisode, loin d’être un cas isolé, s’inscrit dans une longue série de tensions franco-algériennes.

L’Algérie convoque l’ambassadeur de France

Lundi 28 janvier 2025, le gouvernement algérien a convoqué Stéphane Romatet, ambassadeur de France, après des plaintes concernant des traitements "dégradants" infligés aux ressortissants dans les aéroports de Roissy et Orly. Ces voyageurs auraient subi des contrôles intensifs, des files d’attente interminables et un accueil discriminatoire.

La réaction du ministre des Affaires étrangères, Sofiane Chaib, a été immédiate. Dans un communiqué, il a dénoncé "des pratiques humiliantes qui ne sauraient être tolérées" et exigé des explications de la part de Paris. Face à ces accusations, les autorités françaises ont tenté d’apaiser la situation. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a rejeté toute accusation de traitement ciblé, évoquant un "dysfonctionnement isolé" au sein de la Police aux Frontières (PAF) et non une politique ciblant spécifiquement les Algériens. Mais cette explication ne convainc pas Alger, qui demande des garanties formelles pour éviter la répétition de tels incidents.

Les accusations algériennes : humiliations et discriminations

Selon le communiqué officiel du ministère algérien des Affaires étrangères, ces agissements constitueraient une "atteinte à la dignité des citoyens algériens", et Alger exige que la France mette fin immédiatement à ces pratiques.

Des témoignages relayés par des médias étrangers, notamment El Moudjahid et Echourouk, dénoncent des contrôles disproportionnés et ciblés exercés sur les voyageurs algériens. Un seul guichet aurait été ouvert pour eux à l’aéroport de Roissy, entraînant des files d’attente interminables. De plus, certains passagers affirment avoir subi des contrôles supplémentaires intrusifs, accompagnés de fouilles approfondies.

Un nouvel épisode dans une relation sous tension

Ce n’est pas la première fois que l’ambassadeur de France est convoqué à Alger. En décembre 2024, il avait déjà été sommé de s’expliquer sur des déclarations de Bruno Retailleau concernant l’immigration algérienne. Cette répétition des convocations diplomatiques traduit une montée en tension entre les deux pays.

Dans ce contexte, l’Algérie ne se limite pas à des protestations diplomatiques : elle renforce son discours anti-français sur plusieurs dossiers sensibles. Une posture défensive qui, aux yeux de certains analystes, vise autant à mobiliser l’opinion publique interne qu’à peser dans les négociations avec Paris.

Essais nucléaires : un dossier explosif jamais refermé

Les dissensions entre les deux pays sont multiples, et les estocades de plus en plus courantes. L’Algérie vient de voter une loi exigeant que la France prenne en charge la décontamination des anciens sites nucléaires utilisés entre 1960 et 1966. Cette demande n’est pas nouvelle, mais elle revient sur le devant de la scène à un moment où les relations sont déjà tendues.

Les autorités algériennes estiment que des milliers de personnes souffrent encore des effets de la radioactivité. Mais la France, de son côté, souligne que ces essais ont continué après l’indépendance sous la supervision du nouveau gouvernement, ce qui implique une responsabilité partagée.

Bruno Retailleau, nouvelle cible de

Si les tensions sont vives, elles sont aussi incarnées par des figures politiques. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, est devenu l’ennemi numéro un en Algérie. La presse nationale le qualifie de "ministre de la haine", responsable d’une politique de durcissement envers leurs ressortissants en France.

Dans certains médias, on retrouve des accusations allant jusqu’à le traiter de "néofasciste" ou encore l'accuser de chercher à "humilier les Algériens". Une polémique qui s’inscrit dans un contexte où Paris durcit le contrôle des Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF), une mesure qui concerne un grand nombre de ces ressortissants.

Un pays fondé sur la haine de la France

L’Algérie, pays jeune né en 1962, a construit une partie de son identité nationale sur l’opposition à la France. Cette hostilité est encore utilisée aujourd’hui par le régime pour maintenir une cohésion nationale face aux défis internes. Aujourd'hui, de plus en plus de France souhaitent que la France change de comportement pour être plus ferme.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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