Le FN à 33 % est il toujours un parti extrêmiste ?

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Par Nicolas Dhuicq Modifié le 23 mars 2015 à 10h19
Front National Parti Extreme Droite

Notre société est confrontée à plusieurs fractures qui créent angoisse et sensation d'éloignement des centres de décision pour l'électeur. Or, ces perceptions n'ont pas été prises en considération par les partis installés qui restent sur la vision d'une rationalité purement économique. Ainsi, le plus souvent, le seul Front National semble prendre en compte les inquiétudes de nos compatriotes.

Ce mouvement politique peut alors, au risque de contradictions internes massives, proposer des réponses audibles et simples aux interrogations du corps électoral.

Les électeurs sont déboussolés

La première fracture concerne un rapport au temps qui est désormais très perturbé dans les sociétés contemporaines. Dans un monde où la majorité des habitants de nos villes sont en permanence connectés à des réseaux sociaux et surtout soumis à un flux continu de données, il est de plus en plus compliqué de pouvoir faire le tri nécessaire pour obtenir une pensée cohérente du monde. Si l'on ajoute l'abandon, délétère à moyen terme, de la transmission du roman national par le système scolaire, aucun fondement n'est donné à l'électeur pour avoir les moyens de replacer dans un temps plus long la suite des événements qu'il reçoit de manière passive. La Nation doit rester un ancrage fort pour nourrir une appartenance à un mouvement collectif qui fasse lien, il est donc logique que le parti politique auquel les autres formations en ont abandonné l'usage, en recueille les fruits électoraux.

La fracture économique de la France

La deuxième fracture est économique dans le sens où seul un consumérisme de court terme est soutenu idéologiquement par les politiques actuelles. Une vision anglo-saxonne de la construction européenne domine le continent et ses institutions. La circulation, ultra-rapide et virtuelle des capitaux, crée une aliénation du travail et non plus par le travail. Ainsi tous les métiers des secteurs de production, particulièrement dans le monde ouvrier et les classes moyennes péri-urbaines, ressentent un déclassement symbolique puissant, relayé en période de crise chronique par une chute réelle du statut économique, qui n'est pas expliqué par les élites dirigeantes. Celui ou celle qui aborde cette question parle au peuple.

Un discours politique inchangé

La troisième fracture est donc idéologique, avec un discours inchangé des dirigeants qui semblent continuer à croire en un modèle, valable pour quelques personnes, mais inopérant pour les masses laborieuses. Populations auxquelles, par démagogie, on enseigne que tout le monde peut avoir un avis éclairé sur toute question. Cette fracture est la plus grave, car, à terme, elle sappe les fondements de la République, qui a justement besoin d'élites de devoir et de droit pour pouvoir fonctionner. C'est là le danger majeur de l'aspect populiste anti-élites des discours démagogiques, repris par les gouvernants dans une version masochiste qui consiste à systématiquement atteindre par exemple les professions libérales ou abaisser le statut des élus nationaux, dans un puits sans fond.

Une fracture ethnique

La quatrième fracture est ethnique, avec dans l'Ouest et le Sud-ouest de la France métropolitaine une population plus stable dans ses origines, tandis qu'au Sud, au Nord et à l'Est les flux migratoires, réels ou ressentis, modifient les équilibres démographiques antérieurs. Un sentiment d'étrangeté survient alors dans des populations habituées jusque là à une certaine homogénéité. La question du rapport à un islam sunnite déformé par la gangrène wahhabite, elle-même nourrie de pétro-dollars, est un des problèmes majeurs. Les réponses de surface qui consistent en fait à éluder la question, nourrissent le décalage entre la réalité et le discours. Plus grave à terme elles produiront le résultat inverse de celui recherché, à savoir rejet et violence. Là encore le champ est abandonné et laissé au seul Front National qui apparaît comme unique force prenant en compte la réalité.

Le Front National apparaît comme un parti qui écoute ses électeurs

Ainsi, le Front National apparaît, non pas comme une réponse pour la majorité des électeurs, mais comme une écoute. Les contradictions entre cet aspect et un discours économique intenable, qui est celui du programme commun de la gauche en 1981, ne sont jamais abordées par le débat public. L'ostracisation de ce parti sert à court terme les intérêts de la gauche socialiste, car, tant que la droite n'aura pas de corpus théorique, elle perdra les élections majeures de 2017 pour quelques victoires locales provisoires.

Le Front National pourra-t-il résister à ses contradictions internes, et pendant combien de temps ? Mais surtout la droite aura-t-elle enfin le courage et la volonté d'un travail intellectuel, tout d'abord sur le vocabulaire? Car les victoires politiques doivent avoir une utilité pour notre pays. La prise d'un pouvoir, souvent illusoire, ne peut plus être une cause de succès auprès d'un électorat désabusé. N'oublions pas que les réussites électorales se préparent culturellement.

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Nicolas Dhuicq est député (UMP) de la première circonscription de l'Aube

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