Trump et la France : une amitié transatlantique en perte de vitesse

L’amitié entre la France et les États-Unis, longtemps considérée comme un pilier des relations internationales, semble aujourd’hui sujette à des remises en question. Les récents sondages révèlent une évolution significative de l’opinion publique française à l’égard de son allié historique.

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By Elie Avot Published on 8 mai 2025 9h00
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USA, france, alliance, politique, Trump, sondage, - © PolitiqueMatin

À l’heure des commémorations de la fin de la Seconde Guerre mondiale, un vent de scepticisme souffle sur les relations diplomatiques entre Paris et Washington. Un sondage de l’Ifop pour NYC.eu met en lumière une remise en cause inédite de l’alliance transatlantique par l’opinion publique française. Ce désalignement ne se limite pas à une querelle d’images : il reflète des dissensions profondes sur les choix stratégiques, les représentations historiques, et le futur des équilibres internationaux.

Une relation historique fragilisée par la présidence Trump

Selon l’enquête Ifop, seuls 27 % des Français considèrent aujourd’hui les États-Unis comme un « pays allié ». À l’inverse, 34 % les perçoivent comme un « pays neutre » et 26 % comme un « pays ennemi ». Ce renversement d’image est attribué à la politique étrangère de Donald Trump, jugée hostile, notamment en matière de sécurité européenne. L’ancien président a notamment menacé de retirer le soutien militaire américain à l’Ukraine et d’abandonner les engagements de l’Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), provoquant un sentiment d’abandon chez nombre d’alliés historiques.

Ces positions radicales ne sont pas restées sans écho. Toujours selon le sondage Ifop, une majorité de Français (58 %) souhaite désormais que l’Europe développe une défense totalement indépendante des États-Unis. Ce chiffre illustre une perte de confiance structurelle, bien au-delà d’un simple rejet personnel de Trump.

« Les États-Unis ont perdu la confiance de citoyens qui, en France comme au Canada, les percevaient pourtant comme des amis depuis des décennies. »

— François Kraus, Directeur du Pôle Politique & Actualités de l’Ifop (source : Ifop pour NYC.eu)

Mémoire historique et dissonance transatlantique

L’étude révèle également une fracture mémorielle entre la France et les États-Unis. Si Donald Trump affirme que son pays a « fait plus que n'importe quel autre » pour vaincre l’Allemagne nazie, les archives de l’Ifop montrent qu’en mai 1945, les Français plaçaient l’Union soviétique en tête (57 %), loin devant les États-Unis (20 %) et le Royaume-Uni (12 %).

Ce n’est qu’avec le temps, et notamment sous l’influence des commémorations du Débarquement et des représentations hollywoodiennes, que la perception a évolué. Aujourd’hui, 60 % des Français reconnaissent le rôle des États-Unis dans la défaite du Troisième Reich, reléguant l’URSS à 25 %.

« Le rôle crucial de l’US Army s’est imposé comme un fait dans la mémoire collective des Français — notamment des plus jeunes. »

— François Kraus, Ifop (source : Ifop pour NYC.eu)

Une opposition croissante à l’impérialisme américain

Le désalignement ne s’arrête pas à la mémoire ou aux alliances militaires : il s'étend à la vision même du rôle des États-Unis dans le monde. Le même sondage Ifop montre que 78 % des Français rejettent fermement l’annexion du Canada par les États-Unis, projet évoqué par Donald Trump, tout comme 77 % refusent celle du Groenland et 75 % s’opposent à la prise de contrôle du canal de Panama.

Plus encore, 44 % des Français déclarent que la France devrait s'opposer par la force à une telle annexion, si nécessaire. Ce positionnement révèle une volonté croissante de réaffirmer une souveraineté européenne face à des velléités expansionnistes perçues comme archaïques et contraires au droit international.

« Les velléités expansionnistes de Donald Trump en Amérique du Nord apparaissent très éloignées des attentes de ses administrés. »

— François Kraus, Ifop (source : Ifop pour NYC.eu)

Vers une redéfinition du lien transatlantique ?

L’aspiration à une autonomie stratégique européenne n’est pas nouvelle, mais elle trouve dans le contexte actuel un écho renouvelé. L’indifférence américaine face à des partenaires historiques comme la France, couplée à une politique étrangère perçue comme erratique, pourrait définitivement rompre le lien transatlantique tel qu’il a été conçu en 1945.

Pourtant, cette rupture n’est pas nécessairement un rejet global des États-Unis. Les sondages montrent aussi qu’une partie importante des Français continue à entretenir une forme de respect historique, voire culturel, pour les États-Unis. Ce qui est remis en cause, ce sont les orientations politiques et stratégiques récentes, incompatibles avec les intérêts européens.

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