Alors que les syndicats avaient appelé à une mobilisation dans toute la France à l’occasion du 1ᵉʳ mai, la journée a été marquée par une participation importante mais aussi par des tensions inhabituelles dans le cortège parisien.
1er Mai : le PS attaqué, la gauche fracturée dans les cortèges

Le 1ᵉʳ mai 2025 a rassemblé plusieurs centaines de milliers de personnes dans plus de 250 villes en France. Si les défilés ont dans l’ensemble respecté les mots d’ordre syndicaux, une séquence violente survenue à Paris a focalisé l’attention politique et médiatique. Des membres du Parti socialiste ont été violemment pris à partie en marge du cortège, dans un climat déjà tendu entre différentes composantes de la gauche. Ces incidents ont entraîné des réactions fermes des représentants politiques, y compris dans l’hémicycle.
Une mobilisation significative sur fond de revendications sociales
D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur, environ 157 000 personnes ont défilé en France, dont 32 000 à Paris. De leur côté, les syndicats annoncent 300 000 manifestants, avec une estimation de 100 000 dans la capitale. Ces données traduisent une hausse notable par rapport à 2024, particulièrement à Paris, où la participation aurait presque doublé selon les autorités.
Plusieurs centrales syndicales, dont la CGT, Solidaires et la FSU, avaient appelé à manifester autour d’un socle revendicatif commun : l’abrogation de la réforme des retraites, l’augmentation des salaires et la défense des services publics. Des cortèges se sont également mobilisés sur des problématiques locales, à l’image du rassemblement à Dunkerque contre le plan de restructuration d’ArcelorMittal. La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a qualifié la mobilisation de "réussite", tout en rappelant que le 1ᵉʳ mai devait rester un moment d’expression sociale pacifique.
Des violences ciblées dans le cortège parisien
Le déroulé de la journée a toutefois été perturbé par un incident grave survenu boulevard de l’Hôpital, à Paris, où le stand du Parti socialiste a été visé par un groupe d’individus masqués, vêtus de noir. Plusieurs militants et élus socialistes ont rapporté avoir été agressés physiquement et verbalement, certains évoquant des insultes antisémites. Le député Jérôme Guedj a dû être exfiltré sous la protection de ses collègues et du service d’ordre.
Le parquet de Paris a confirmé l’ouverture d’une enquête pour violences volontaires. Une personne a été placée en garde à vue pour usage de mortiers dans la zone concernée. Au total, 72 interpellations ont eu lieu dans toute la France, dont 52 à Paris, selon les autorités. Parmi elles, 28 ont conduit à des gardes à vue.
Ces événements ont donné lieu à de nombreuses prises de parole publiques. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a annoncé le dépôt de plusieurs plaintes. D’autres cadres du parti, comme Boris Vallaud et Chloé Ridel, ont dénoncé une volonté d’exclusion politique et une instrumentalisation violente du cortège. À gauche, des responsables écologistes ont également exprimé leur solidarité, rappelant que la manifestation devait rester un lieu de convergence, et non d’exclusion.
Une séquence politique révélatrice des tensions internes à la gauche
Au-delà de l’agression elle-même, les réactions qui ont suivi traduisent un malaise plus large. Au sein du gouvernement, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a pris la parole dès le lendemain pour condamner l’attaque, estimant qu’il s’agissait d’un acte de rejet politique grave. À l’Assemblée nationale, les députés de plusieurs groupes, y compris ceux de la majorité et du Rassemblement national, ont apporté leur soutien à Jérôme Guedj. Le Premier ministre Gabriel Attal a qualifié les faits de « choquants » et a évoqué des propos à « résonance antisémite » inacceptables dans un rassemblement républicain.
L’épisode a également rouvert la question de la cohabitation au sein des cortèges entre groupes syndicaux, partis politiques et mouvances plus radicales. Plusieurs élus ont pointé une forme d’ambiguïté dans le discours de certains courants d’extrême gauche. Si la plupart des formations ont clairement condamné les violences, certains responsables de La France insoumise ont préféré se concentrer sur les revendications économiques et sociales, sans commenter directement les incidents parisiens.
Enfin, la question de la sécurité lors des manifestations revient au centre des préoccupations. Le préfet de police Laurent Nuñez avait indiqué dès la veille craindre des débordements liés à la présence de « groupes issus de la mouvance radicale », identifiés comme hostiles à toute représentation partisane. Les forces de l’ordre ont procédé à plusieurs contrôles préventifs dès le début de la matinée à Paris, ce qui n’a pas suffi à éviter les violences localisées dans le cortège.
Une fête du travail sous tension, entre démonstration sociale et ligne de fracture politique
Le 1ᵉʳ mai 2025 restera marqué par une participation en nette hausse, signe que les questions sociales mobilisent encore largement, malgré l’absence d’unité syndicale affichée. Dans de nombreuses villes, les cortèges se sont déroulés dans le calme. Mais les incidents survenus à Paris ont polarisé l’attention, illustrant une tension croissante entre certaines composantes de la gauche et des formes de radicalité politique.
L’attaque du stand socialiste n’est pas seulement un fait divers. Elle soulève des questions de fond sur la capacité des forces de gauche à partager un même espace public, même dans un cadre aussi symbolique que le 1ᵉʳ mai. L’enjeu n’est plus seulement celui de la cohésion, mais de la définition même du périmètre politique légitime au sein des mobilisations sociales.