Cyril Hanouna s’en sort à moitié : l’impunité médiatique en marche ?

L’affaire paraissait classée, mais les remous d’un plateau de télévision continuent d’agiter les arcanes du pouvoir. Le verdict concernant Cyril Hanouna est tombé, mais son allègement interroge.

Adelaide Motte
By Adélaïde Motte Published on 7 mai 2025 16h24
cyril hanouna
Cyril Hanouna s’en sort à moitié : l’impunité médiatique en marche ? - © PolitiqueMatin

Le 6 mai 2025, le Conseil d’État a tranché : l’amende infligée à la chaîne C8 pour des propos tenus par Cyril Hanouna lors d’une émission diffusée le 5 octobre 2022 est réduite de moitié. Une décision qui, tout en reconnaissant la gravité des faits, infléchit la sévérité de la sanction imposée en mai 2023. L’affaire relance un débat déjà brûlant, entre liberté d’expression, responsabilité médiatique et ambitions politiques d’un animateur dont l’influence dépasse largement les plateaux de télévision.

Cyril Hanouna : quand l’animateur dérape et que l’Arcom sévit

Dans une séquence de l’émission « Touche pas à mon poste » (TPMP) diffusée le 5 octobre 2022 sur la chaîne C8, Cyril Hanouna s’en est pris à Anne Hidalgo, alors absente du plateau. Ce soir-là, l’animateur avait lancé : « Ferme ta gueule » et « qu’elle aille chasser les rats la nuit au lieu de dire des conneries ». Loin d’être un simple écart de langage, cet incident s’ajoutait à une série de manquements pointés par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

En mai 2023, l’Arcom sanctionne la chaîne d’une amende de 300 000 euros, invoquant une atteinte à la dignité des personnes, en particulier d’élus de la République, et un manquement aux règles déontologiques. C8, propriété du groupe Canal+ et sous l’influence du magnat Vincent Bolloré, décide alors de saisir le Conseil d’État.

Le Conseil d’État tranche : une amende divisée par deux

La juridiction administrative suprême a statué le 6 mai 2025. Elle considère que l’amende infligée par l’Arcom est « excessive » et décide de la ramener à 150 000 euros. La motivation ? Selon la décision consultée par l’AFP et relayée par Le Figaro, le Conseil d’État tient compte « de la gravité des manquements en cause et de l’ensemble de leurs caractéristiques », tout en réaffirmant le caractère fautif des propos de l’animateur.

Une sanction donc maintenue dans son principe, mais adoucie dans son quantum. La réduction de la peine est perçue par certains comme un signe d’indulgence à l’égard d’un animateur aux sorties souvent controversées mais à l’audience indiscutable. Pour d’autres, elle reflète une appréciation nuancée du droit d’expression dans l’espace médiatique.

Une chaîne en sursis, un animateur en campagne ?

L’affaire ne tombe pas du ciel. Elle s’inscrit dans un enchaînement de sanctions successives contre C8. L’Arcom avait déjà confirmé en juillet 2024 une amende de 3,5 millions d’euros pour des propos injurieux visant le député Louis Boyard, émis dans un autre épisode de TPMP. Cumulant plus de 7,6 millions d’euros de sanctions, C8 n’a pas vu sa fréquence TNT renouvelée. Elle a cessé d’émettre en mars 2025, mettant fin à une présence de plus de quinze ans sur le réseau hertzien.

Pendant ce temps, Cyril Hanouna, loin de battre en retraite, prépare son arrivée sur W9 et Fun Radio sous la bannière du groupe M6 dès septembre. Plus encore, l'animateur flirte désormais ouvertement avec les ambitions présidentielles. Si ses déclarations à ce sujet varient, les rumeurs se renforcent, alimentées par des confidences et des positions publiques au ton de plus en plus politique.

L’homme-orchestre de TPMP capitalise sur une image antisystème, surfe sur une rhétorique populiste et vise une électorat souvent méprisé par les élites traditionnelles. À ceux qui lui demandent s’il se présentera en 2027, il répond en alternant provocation et silence stratégique.

Une justice médiatique à géométrie variable ?

Faut-il y voir un recul du régulateur face à la pression médiatique et politique ? Ou au contraire, une illustration d’un État de droit respectueux du principe de proportionnalité des peines ? Dans les deux cas, l’affaire Cyril Hanouna – Anne Hidalgo révèle la porosité entre le champ médiatique et l’arène politique, et questionne une nouvelle fois la capacité du système à encadrer des figures hors-norme.

En définitive, le Conseil d’État a tranché. Mais la question demeure : jusqu’où laissera-t-on Cyril Hanouna faire la pluie et le beau temps sur les écrans… et peut-être bientôt dans les urnes ?

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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