Monsieur le Premier Ministre, Les Français sortent de l’état de sidération dans lequel la lecture de Un Président ne devrait pas dire ça… les a plongés et prennent tous les jours un peu plus la mesure des dommages que les divulgations incontrôlées du président de la République ont causé en France et à l’international.
La perte de crédit de légitimité et d’autorité est particulièrement flagrante auprès de ceux qui sont les partenaires du chef de l’Etat, chef des Armées, et ce dans une période de graves menaces qui pèsent sur notre pays ayant exigé l’état d’urgence.
Compte tenu des secrets d’Etat divulgués avec la plus déconcertante légèreté aux deux journalistes du Monde, des réactions en chaîne ont suivi dans la presse internationale. Comment peut-on imaginer que les liens de confiance nécessaires puissent encore subsister ? Comment maintenir avec nos alliés, au plus haut niveau de l’Etat, une relation de coopération nécessaire pour faire face ensemble à tout l’éventail des menaces qui pèsent sur notre pays ? Quel est le chef d’Etat qui aura encore aujourd’hui assez confiance dans le Président français pour partager avec lui préoccupations, informations ou options stratégiques, sans crainte de voir ses propos faire la Une des journaux, comme ce fut le cas pour la Grèce et la Russie ?
Quels sont les responsables des services secrets qui seront prêts à mettre leur vie et leur carrière en danger au service de la France, si le secret, seul garant de leur succès, est sciemment éventé par le garant de la sécurité nationale au plus haut niveau ? Quel militaire confronté à l’imminence d’un danger ou d’une décision importante prendra désormais le risque d’en référer au chef des Armées alors que le secret défense a été traité avec la même légèreté que des potins de salon ? Par ses errements, l’actuel locataire de l’Elysée s’est lui-même « empêché » de répondre à sa mission au service de la sécurité du peuple qui l’a élu.
Quand on accuse le président de la République de forfaiture, non sans raison, il faut aller jusqu’au bout
Déliquescence de l’autorité présidentielle. Dans ces conditions, Monsieur le Premier ministre, nous vous demandons, conformément à l’article 7 de notre Constitution, de saisir sans attendre le Conseil constitutionnel pour qu’il se prononce sur la réalité d’un « empêchement » qui découlerait de la déliquescence de l’autorité présidentielle liée à des révélations inadmissibles.
C’est le devoir patriotique du chef du gouvernement vis-à-vis de l’ensemble des institutions garantes de notre sécurité, que de faire cesser la déliquescence consécutive à l’irresponsable diffusion durant des mois et des mois d’informations les plus secrètes concernant les intérêts vitaux du pays. Un gage de sérieux à donner au monde. Vous ne pouvez pas, Monsieur le Premier ministre, être complice de cet état de fait !
La situation dépasse l’enjeu de tous les clivages politiques. Il n’est d’ailleurs pas à l’honneur de l’ensemble de notre classe politique de ne pas avoir entrepris de mobiliser l’Assemblée nationale pour qu’une destitution soit envisagée (art. 68 de la Constitution) ; ce sera alors au Conseil constitutionnel ou à la Haute Cour de justice de trancher ; s’il n’y a rien à condamner gravement dans ce qui a été publié, quel est le risque ? Les Français et le monde extérieur s’étonnent de la passivité de la classe politique qui se contente de ricaner au mieux de s’indigner, plus préoccupée semble-t-il par la conquête du pouvoir que par l’intérêt de la France. Quand on accuse le président de la République de forfaiture, non sans raison, il faut aller jusqu’au bout.
Sophie de Menthon - Présidente du mouvement ETHIC. Ancien membre du Conseil Economique, Social et Environnemental,