Vingt milliards d’euros d’économies nécessaires pour contrer le déficit public

Catastrophe. Le déficit public plonge plus profond encore que dans les plus sombres prévisions, et Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, et Thomas Cazenave, ministre des Comptes publics, ne savent plus à quel saint se vouer. Seule solution : vingt milliards d’euros d’économies en 2025.

Adelaide Motte
Par Adélaïde Motte Publié le 7 mars 2024 à 17h18
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Dix... non, vingt milliards d'économies

On nous annonçait dix milliards d'euros d'économie 2024, et à la fin de l'année, l'effort sera loin de suffire. Douze à vingt milliards, c'est ce qu'il faudrait économiser en 2025 pour espérer ramener le déficit public sous les 3% du PIB. Or, c'est là une promesse régulièrement rappelée par Bruno Le Maire, le déficit public doit être sous les 3% d'ici 2027. Pour 2023, le déficit sera, selon Bruno Le Maire, « significativement au-delà des 4,9% ». Autrement dit, pas loin du double de l'objectif. Avec les dix milliards d'économies de 2024, le gouvernement espère passer à 4,4%, soit une réduction de 0,5 point. Les économies se feront principalement dans les secteurs de la transition écologique, du travail et de l'éducation. 

L'erreur du gouvernement peut être due à une mauvaise appréciation des conséquences de l'inflation sur les comportements des Français. Si, par exemple, le coût de l'énergie augmente, les dépenses contraintes des entreprises et des ménages suivent la même tendance. Les ménages consomment moins, et les entreprises sont contraintes de vendre leurs produits plus chers, d'où une baisse encore aggravée de la consommation. Les bénéfices sont moins importants, les impôts sont à l'avenant, et l'Etat récupère moins d'argent via les taxes, notamment la TVA. Résultat, à la fin de l'année, les rentrées sont bien moins importantes que prévu, et il devient difficile, sinon impossible, d'assurer les dépenses inscrites dans le budget.

Pour les économies, on évite le Parlement

Même si le budget est voté, il est toujours possible de le modifier via un projet de loi de finances rectificatives (PLFR). Tel n'est cependant pas le projet actuel du gouvernement, qui préfère concevoir un plan d'économies, acté par décret. Une façon de se passer du Parlement, et on comprend pourquoi. Depuis les élections législatives, le parti présidentiel ne dispose plus de la majorité absolue et il enchaîne les 49.3 pour faire passer ses propositions. Or, à l'Assemblée nationale, après le parti présidentiel, on trouve le Rassemblement National et la NUPES, deux groupes qui goûtent peu les économies et les coupes budgétaires. Un PLFR n'est donc pas d'actualité avant l'été, soit le moment où les députés ont plus de mal à mobiliser l'opinion publique, sans compter que la moitié de l'année est déjà passée.

La pilule a d'autant plus de mal à passer auprès des Français que le gouvernement, qui vient donc d'annoncer vingt milliards d'économies pour 2025, dix milliards pour 2024 et un déficit de presque 5% pour 2023, avait annoncé une croissance de 1,4% dans le budget du gouvernement pour 2024. Un chiffre dont il avait évidemment été tenu compte, notamment en ce qui concerne les rentrées fiscales, donc les revenus du gouvernement. Ce chiffre avait été remis en question par le Haut Conseil des finances publiques qui le trouvait élevé. Le budget gouvernemental avait néanmoins été voté avec ce paramètre. Or, le gouvernement a reconnu que la croissance serait plutôt de... 1%, ce qui fait tout de même une erreur de 30%. On comprend mieux la course à l'économie, et on s'interroge. Pourquoi ne pas avoir tenu compte des avis des instances qui, après tout, sont payées pour les donner, au lieu de rafistoler un budget à coup d'économies de bouts de ficelles ?

Qu'est-ce que le déficit public ?

Le déficit public correspond à ce que le gouvernement dépense en plus de ce qu'il gagne. Tout bon gestionnaire le sait, que ce soit dans son ménage ou dans son entreprise, lorsqu'on prévoit les dépenses du mois ou de l'année, mieux vaut les maintenir à un niveau inférieur à ce que l'on gagne. Autrement, et à moins d'un investissement juteux, on finit par ne plus avoir un sou vaillant. Il se trouve que la France se comporte en assez mauvais gestionnaire depuis 1974, dernière année où le budget s'est trouvé à l'équilibre : le gouvernement dépensait autant que ce qu'il gagnait. En 2023, le gouvernement a dépensé 173,3 milliards d'euros de plus que ce qu'il a gagné, contre 151,5 milliards en 2022.

Que vient faire le PIB dans cette histoire ? Le PIB est l'acronyme de Produit intérieur brut, autrement dit la valeur des biens et services produits dans un pays sur une année. Si un boulanger produit dix mille baguettes, leur valeur monétaire entre dans le PIB. Il se trouve que le traité de Maastricht demande que le déficit public annuel reste sous la barre des 3% du PIB, et que la dette soit en-dessous de 60% de ce même PIB. Certains économistes contestent cette manière de juger un déficit. Selon eux, le PIB représente des biens et services qui appartiennent à des personnes privées, le boulanger dans notre exemple, et non à l'Etat. Il est donc absurde de mesurer le déficit à cette aune. C'est à peu près comme si des parents considéraient leur budget en fonction du travail fourni par leurs enfants. Une autre façon de mesurer le déficit est de comparer les dépenses de l'Etat et ses recettes.

Adelaide Motte

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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