Alors que les élèves viennent de faire leur rentrée scolaire, des associations du collectif “Ma place c’est en classe” ont sollicité l’institut IFOP pour interroger les enseignants de la maternelle au lycée sur leurs perceptions et propositions concernant l’inclusion des élèves avec handicap en milieu scolaire. L’étude met en lumière l’adhésion des professeurs à l’idée de l’école inclusive, mais aussi leurs besoins en matière d’accompagnement et de formation.
Scolarisation des élèves avec handicap : des enseignants engagés en faveur de l’école inclusive mais en demande d’accompagnement
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Publié le 13 septembre 2023 à 9h00
Un consensus favorable au sein du corps enseignant, mais avec des disparités
A l’instar des Français dans leur globalité, les enseignants du premier degré, du collège et du lycée sont collectivement favorables à ce que les élèves présentant des handicaps soient scolarisés avec les autres enfants, dans des établissements scolaires ouverts à tous. Ils sont 95% à adhérer à l’insertion des enfants en fauteuil roulant ou à mobilité réduite, 88% pour les enfants avec des troubles “dys” (comme la dyslexie, la dysphasie…), 76% pour les enfants sourds, et 73% pour les enfants aveugles. Le résultat est un peu plus nuancé pour les enfants autistes (58%), les enfants avec des déficiences intellectuelles telles que la trisomie 21 (58%) ou encore les enfants avec des troubles psychiques, comme les troubles psychotiques, les TOC, les troubles bipolaires… (44%).
L’expérience passée (avoir déjà scolarisé un élève avec le handicap concerné), l’âge de l’enseignant ou encore la formation reçue atténuent sensiblement les craintes : si les enseignants considèrent à 58% que les élèves avec déficience intellectuelle devraient être scolarisés en école ordinaire, ce chiffre monte à 67% pour ceux qui ont eu l’expérience d’accueil d’un enfant présentant le même type de trouble et à 70% pour les enseignants de moins de 35 ans. De même, pour les enfants aveugles, les enseignants ayant eu une formation à l’accompagnement sont 85% à adhérer à l’idée d’une scolarisation inclusive contre 69% s’ils n’en ont pas bénéficié.
Au-delà de l’insertion en milieu scolaire ordinaire, 79% des enseignants sont également favorables à ce que les élèves avec handicap puissent avoir des évaluations, examens ou concours adaptés à leur handicap, afin de garantir l’équité. Un chiffre qui grimpe à 86% pour les enseignants du premier degré, contre 76% au collège et 73% au lycée.
Toutefois, la perception des enseignants concernant l’insertion en milieu scolaire ordinaire des élèves en situation de handicap démontre qu’il reste du chemin à parcourir. Les répondants estiment que les élèves sont bien insérés au sein du système scolaire à 60% pour les enfants avec des troubles “dys”, à 60% pour les enfants en fauteuil roulant ou à mobilité réduite, à respectivement 36%, 27% et 24% pour les enfants sourds, aveugles et autistes, à 20% pour ceux avec des troubles psychiques et à seulement 19% pour les enfants avec des déficiences intellectuelles telle la trisomie 21. Là encore, l’expérience de scolarisation et la formation des enseignants modifient sensiblement cette perception (écarts allant jusqu’à 12 points).
Entre volontarisme et réalité du terrain
La scolarisation d’élèves en situation de handicap est bien perçue par les enseignants comme un droit (à 90%), avant d’être une obligation professionnelle (83%). Plus de 8 répondants sur 10 (81%) considèrent que c’est “normal” (un chiffre qui grimpe à 91% pour les professeurs de moins de 35 ans). Pour près de trois quarts des professionnels (74%), c’est une nécessité.
Pour autant, l’accueil des élèves en situation de handicap nécessite la mise en place de moyens humains, logistiques et financiers. Ainsi, les enseignants le perçoivent comme une source de travail supplémentaire (95%), une contrainte (80%). Mais en même temps, ils estiment que c’est une richesse (78%) et que cela apporte un véritable enrichissement personnel (80%) et professionnel (75%).
C’est dans cette dualité que réside toute la complexité du sujet. L’accueil des enfants en situation de handicap est aujourd’hui un vrai défi de société. Pour plus de 9 enseignants sur 10 (92%), c’est une démarche à accompagner davantage. L’expérience parle d’elle-même : 68% des enseignants, tous niveaux confondus, qui ont déjà accueilli des enfants en situation de handicap au sein de leur classe, disent que cela a eu un impact positif sur leur vie professionnelle.
Contrer les freins rencontrés par les équipes pédagogiques
S’ils sont favorables à l’idée de l’école inclusive, les enseignants doivent toutefois faire face à un manque de moyens sur le terrain.
Lorsqu’on leur demande quels sont les investissements à privilégier pour améliorer la scolarisation des enfants en situation de handicap dans les établissements scolaires, ils citent en priorité :
- Le recrutement d’aides humaines (AESH) supplémentaires (69%, et même 78% en collège)
- Une baisse du nombre d’élèves dans la classe quand il y a un élève avec projet personnalisé de scolarisation (60%)
- La formation des enseignants et des personnels de l’école à la question de l’accueil du handicap (48%)
- La présence d’enseignants spécialisés référents (42%)
- La présence de professionnels du médico-social référents (31%)
- Le recrutement d’aides humaines (AESH) supplémentaires (69%, et même 78% en collège)
- Une baisse du nombre d’élèves dans la classe quand il y a un élève avec projet personnalisé de scolarisation (60%)
- La formation des enseignants et des personnels de l’école à la question de l’accueil du handicap (48%)
- La présence d’enseignants spécialisés référents (42%)
- La présence de professionnels du médico-social référents (31%)
A noter, les enseignants ayant déjà accueilli des enfants en situation de handicap au sein de leur classe considèrent que les parents d’élèves en situation de handicap sont des partenaires indispensables (92%) et dotés d’un savoir lié à leur expérience sur leur enfant et ses capacités (73%).
“Cette étude reflète bien l’engagement des enseignants en faveur de l’école ordinaire accessible à tous, le besoin de mieux accompagner cette démarche sur le terrain, mais aussi la persistance de préjugés et de craintes. Il est donc nécessaire de renforcer les moyens alloués à cette problématique et de répondre aux besoins de formation, de baisse des effectifs, d’accompagnement par des professionnels formés. On le sait, l’école inclusive est aujourd’hui une réalité qui fonctionne quand elle est mise en place : les nombreux exemples d’insertion réussie en témoignent. Il est indispensable de mobiliser et de sécuriser les moyens nécessaires auprès des équipes pédagogiques, des accompagnants et des familles, pour déployer des dispositifs innovants et efficaces à large échelle et ne laisser personne au bord du chemin. Permettre aux élèves en situation de handicap d’étudier avec les autres enfants, c’est mettre toutes les chances de leur côté pour une insertion réussie en milieu ordinaire une fois adulte. La société inclusive commence par là”, explique le collectif d’associations.
Par les associations membres du collectif 'Ma Place est en classe" ayant participé au sondage : ANPEA, APF France handicap, ASEI, Droit au savoir, Gapas, FCPE, FISAF, FNASEPH, Fédération PEEP, Trisomie 21 France, UNANIMES